Levier de performance et de développement économique
En cette veille de rentrée, le Pam et la CEDEAO se sont retrouvés à Dakar avec des dizaines d’experts pour réfléchir sur les enjeux de l’alimentation scolaire comme levier de performance à l’école, mais également comme moyen de lutter contre le chômage et de promotion de l’autonomisation des femmes à travers les achats locaux.
Une chose est d’inscrire les enfants à l’école, une autre est d’assurer leur maintien à l’école. C’est dans ce cadre que le Programme alimentaire mondial (Pam) et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont joint leurs forces pour prendre en charge la problématique à travers notamment l’alimentation scolaire.
Commissaire de la CEDEAO chargé du développement humain et des affaires sociales, Fatou Sow Sarr fonde beaucoup d’espoir en cette initiative. Pour elle, c’est non seulement un excellent levier pour le maintien des enfants à l’école, mais aussi l’alimentation scolaire contribue aux performances des élèves.
À en croire la commissaire, une prise en charge efficace de cette problématique pourrait aider à éradiquer beaucoup de fléaux qui sont en train de faire des ravages dans les pays de l’Afrique de l’Ouest. ‘’La question principale dans la CEDEAO, c’est la jeunesse. C’est elle qui entre dans les organisations terroristes ; c’est elle qui va prendre les pirogues pour rejoindre l’Europe ou l’Amérique et qui meurt par milliers dans l’océan Atlantique. C’est cette jeunesse qui, dans les zones urbaines, participe à un certain nombre de désordres du fait notamment de son oisiveté, du chômage… L’école est un moyen très important pour régler cette question de la jeunesse’’.
À travers l’école, il s’agira non seulement d’éduquer et de former ces jeunes, mais également de booster le développement économique et social au niveau communautaire. ‘’L’école, c’est aussi une opportunité économique importante pour tous nos pays. C’est un énorme marché qui doit contribuer à la création de richesses et à la création d’emplois. Dans nos pays, il y a énormément de possibilités de création d’emplois. Il suffit de bien identifier les filières par lesquelles on peut mettre à contribution le capital humain dont nous disposons’’, plaide Mme Fatou Sow Sarr. Qui ne manque pas d’exemples pour illustrer son propos. ‘’Rien que la confection des tenues scolaires, dit-elle, c’est un marché extraordinaire. Cela peut permettre de capter beaucoup de richesses qui, jusque-là, échoient à l’étranger. Il en est de même avec l’alimentation scolaire’’.
Pour plus d’autonomisation des femmes
L’idée de ce programme mené par le Pam et ses partenaires, c’est d’utiliser l’alimentation scolaire comme outil pour développer l’agriculture dans les localités concernées. Un programme ambitieux pour non seulement nourrir les élèves, développer l’agriculture, le secteur de la transformation… Une aubaine pour les femmes qui sont dominantes au niveau des secteurs cibles.
L’État, selon Mme Sarr, doit garantir aux femmes le marché des cantines scolaires, puisqu’elles sont majoritaires dans ce secteur. ‘’Cela va leur permettre de s’agrandir, de se formaliser davantage, mais il y va aussi de l’épanouissement de la famille tout entière. Comme vous le savez, les femmes représentent la majorité des populations dans nos pays, mais elles sont souvent laissées en rade dans l’élaboration des politiques publiques. Grâce à ce programme, il est possible de faire des rattrapages qu’il faut. Cela aura un effet d’entrainement sur toute la chaine’’.
Malgré leur importance tant vantée, il est difficile, de nos jours, de voir au Sénégal des cantines scolaires. Mais si l’on en croit les autorités du ministère de l’Éducation, il n’y a pas de quoi s’alarmer, des efforts importants seraient effectivement déployés. C’est du moins ce qui ressort des chiffres du ministère. ‘’Globalement, on a 20 % des écoles qui disposent de cantines, selon les informations données par le représentant du ministère. Cela peut paraitre faible, mais ça montre qu’il y a des efforts. Nous sommes dans un processus et il y a des choses importantes qui sont en train de se faire’’, a rapporté la commissaire au développement humain.
En 2020, souligne pour sa part la représentante régionale par intérim du Pam en Afrique de l’Ouest et centrale, la zone CEDEAO avait environ 20 millions d’enfants dans les programmes de cantine scolaire. ‘’Toute l’Afrique, c’est 66 millions. Pour cette année 2022, malgré les difficultés, on est à plus de 22 millions pour les pays de l’Afrique de l’Ouest. Cela montre que nous sommes sur le bon chemin’’, a indiqué Margot Van Der Velden. Qui ajoute : ‘’L’ambition est énorme. C’est d’aller vers une couverture nationale. C’est un grand défi, mais nous y sommes résolument engagés. En ce qui concerne le coût, il faut juste comprendre qu’un dollar investi sur les cantines scolaires, c’est un retour sur investissement de neuf dollars. De plus, les cantines scolaires, c’est plus que nourrir les enfants. C’est aussi contribuer au développement des producteurs et transformateurs locaux, mais surtout à l’autonomisation des femmes.’’
MOR AMAR