‘’Remettre en cause le nouveau découpage de l’année est inopportun’’
Une semaine seulement après la tenue des Assises nationales de l’éducation nationale, le Grand cadre des syndicats des enseignants du Sénégal est revenu à la charge pour fustiger l’attitude du ministère de l’Education nationale à vouloir violer la loi qui délimite le calendrier scolaire. La conseillère technique du ministère de l’Education, chargée des syndicats, des affaires sociales et des questions de genre, apporte dans cet entretien sa part de vérité. D’après Mme Marie Siby, ‘’remettre en cause le nouveau découpage de l’année scolaire est inopportun’’ et le décret qui organise le calendrier scolaire est pris chaque année.
Les enseignants ont été bloqués par un dispositif sécuritaire. Pourtant selon les termes de Souleymane Diallo, Secrétaire général du Syndicat des enseignants libres du Sénégal (SELS), ils étaient venus non pas pour un sit-in mais pour rencontrer leur ministre de tutelle. Qu’est-ce qui s’est réellement passé ?
Je ne puis vous dire avec exactitude quelles ont été les motivations des syndicats ce jour-là. Par contre, à l’instar de tout le monde, j’ai entendu Mamadou Lamine Dianté, coordonnateur du Grand Cadre, lancer ‘’un appel à l’ensemble des Sénégalais, épris de justice et d’équité ‘’ pour leur présence au « sit-in » que ladite structure organise devant le Ministère.
Quant au refus du Ministre de les recevoir, je rappelle que comme à l’accoutumée, ils peuvent le saisir par les voies habituelles en cas d’urgence. Mais, au moment où ils étaient au MEN, se tenait le Conseil des Ministres.
Une semaine seulement après la tenue des Assises, les syndicats fustigent déjà l’attitude du ministre. On est en droit de se demander alors à quoi ont servi les Assises ?
Les Assises ont permis aux Sénégalais de proposer une nouvelle école, dans un nouveau cadre et suivant une nouvelle démarche. Par respect pour ces milliers de militants de l’école, on ne peut pas remettre en cause l’extraordinaire travail abattu pendant près de 12 mois. Il faut aussi faire la part des choses entre les réactions de certains syndicats et les Assises, qui sont loin d’être un cadre de gestion des plates-formes revendicatives.
Les récriminations des syndicats ne peuvent et ne doivent pas entamer l’espoir des populations au sortir de ces importantes concertations. Cependant, il est évident que la stabilité du secteur est un déterminant fort dans le cadre de la mise en œuvre des conclusions des Assises. En attestent les instruments de stabilité sociale proposés pour accompagner le processus. C’est pourquoi nous lançons un appel pour plus de sérénité. Notre école en a besoin.
Les syndicalistes reprochent au ministre d’avoir une méthode cavalière. Est-ce à dire qu’il n’est pas possible de discuter sur certaines questions avant la prise de décision ?
Dès sa prise de service et à la première rencontre avec les syndicats, le Ministre a marqué toute sa disponibilité à discuter avec l’ensemble des acteurs sur les questions d’éducation. Maintenant, la question est de savoir si la nécessité de concertation devrait ôter à l’autorité le pouvoir de décisions ? Je pense que non. Il faut se concerter mais la concertation ne doit pas inhiber la puissance publique, garante de l’intérêt général. La responsabilité de la gestion du secteur lui incombe et il a obligation de rendre compte dans ce cadre.
Vous avez fixé la rentrée scolaire au 29 septembre. Le Grand cadre des syndicats d’enseignants affirme que vous avez violé une loi. Laquelle, selon les syndicalistes, veut que l’année scolaire s’étende du 1er octobre au 31 juillet ?
Nous leur demandons de nous donner les références de cette loi et les dispositions seront prises pour corriger ce dysfonctionnement. Dans un pays de droit, si un citoyen estime qu'une loi est violée par un décret, il dépose un recours auprès de la Cour suprême pour que le décret soit cassé. C’est un décret qui a toujours organisé le calendrier scolaire et il est pris chaque année. Au sortir des Assises de l’Education au cours desquelles il a beaucoup été question de rupture, remettre en cause le nouveau découpage de l’année est inopportun.
Nous devons commencer par rompre d’avec les anciennes pratiques pour le bien de nos enfants. Et, au moment où des acteurs mènent la ‘’ campagne oubi tey jang tey ‘’, toutes les énergies devaient être mobilisées autour de cette action de haute portée civique. Par ailleurs, en tant qu’enseignant, nous devons être les premiers à appeler au respect des lois et de la réglementation en vigueur.
Et s’il y a des enseignants qui ne se présentent pas dans les établissements scolaires à la date indiquée ?
Je ne dirais pas qu’ils ont failli à leur mission, mais ils n’auront pas respecté la réglementation. Dans les normes, toute personne qui enfreint la réglementation sait qu’il s’expose à des sanctions.
La rentrée des classes pour les élèves, c’est aussi le 08 octobre. Est-ce que l’ensemble des établissements scolaires seront fonctionnels si l’on sait que nous sommes en période d’hivernage ?
Le ministre a rencontré l’ensemble des Inspecteurs d’académie pour les dispositions à prendre pour que la rentrée se passe dans les conditions les meilleures.
Depuis l’arrivée de Serigne Mbaye Thiam, les enseignants disent avoir constaté que la commission de la gestion démocratique du personnel enseignant ne fonction plus. Du coup, ils parlent de dissolution qui ne dit pas son nom. Expliquez-nous les raisons de cette léthargie.
La dernière réunion de la Commission Gestion démocratique date de 2009, et la léthargie était due en partie aux perturbations qui ont plus centré sur les énergies sur les revendications. Le vendredi 22 août 2014, a été tenue une rencontre entre le MEN et les partenaires (syndicats et société civile) qui avait pour objet la gestion démocratique. C’est ainsi que la proposition de relance des activités de ladite commission a été faite avec la liste des points à examiner en priorité. Et je dois dire que si cette Commission est instituée, elle n’a jamais été formalisée à travers un cadre réglementaire. Pour ce faire, Monsieur le Ministre a donné instruction aux services compétents du MEN pour la saisine des autres départements ministériels concernés en vue de l’élaboration d’un projet de texte régissant ce cadre de concertation.
Les syndicalistes évoquent également des manquements liés à l’utilisation du logiciel Mirador. Ils ont même employé le vocable fiasco. N’est-il pas plus judicieux d’attendre que le logiciel soit vraiment fonctionnel pour l’introduire ?
Qui parle de fiasco ? Cette année, le mouvement a enregistré plus de candidats que les années précédentes avec plus de 14 000 demandes individuelles. Ce jour à 19 heures 38 (hier), on était à 30 696 inscriptions. Si le logiciel n’était pas fonctionnel, on n’aurait pas atteint ce chiffre.
Le 19 juin 2014, les syndicats ont invité le MEN à une rencontre sur MIRADOR, au cours de laquelle ils ont pris l’engagement d’accompagner le ministère dans le processus de mise en œuvre de cette application. Lors de cette réunion, les représentants du MEN en l’occurrence le DPRE (direction de la planification et de la réforme de l’éducation) et la DRH (direction des ressources humaines) avaient demandé aux syndicats de leur proposer une feuille de route pour plus d’efficacité dans la démarche. Feuille de route qui, jusqu’à présent, est attendue.
MIRADOR assure aujourd’hui une gestion transparente et rationnelle des ressources humaines et un suivi permanent de la mobilité des personnels. Toutefois, comme toute innovation, il y a des résistances, ce qui ne va pas nous faire reculer en si bon chemin, tout le système gagnerait à parfaire ce système de gestion. Notre conviction est que personne ne peut arrêter le progrès.
Un enseignant en position de stage retourne à son académie après sa formation à la Fastef. Pourquoi le ministre décide de les réaffecter. N’est-ce pas là une violation du droit des enseignants ?
Aucun droit n’est violé d’autant plus que la Loi 61/33 du 15 janvier 1963 qui encadre entre autres les sorties temporaires et définitives des agents est claire sur la période de mise en position de stage qui excède six mois. En effet, l’agent ne peut plus prétendre occuper son poste d’origine à son retour. Dans le secteur de l’éducation, la durée du stage varie entre un et deux ans selon le cycle et on ne peut malheureusement pas faire de réservation de place. La commission de mutation essaie dans la mesure du possible de les mettre soit dans l’établissement où ils ont servi, dans la circonscription ou la région, à défaut, ils vont là où le besoin se fait sentir.
Au moment où il est beaucoup question d’équité dans l’allocation des ressources, les dispositions seront prises pour que l’ensemble des enfants sénégalais puisse profiter du professionnalisme et de l’expertise des enseignants.
Comment expliquer alors que des agents qui font des concours professionnels ne parviennent pas à bénéficier de la formation indiquée ?
Il n’a jamais été question de freiner le développement personnel d’un agent en l’empêchant de renforcer ses capacités. Par contre, il s’agit pour le système de réorganiser le dispositif afin de ne pas dégarnir les classes.
C’est la raison pour laquelle, il est demandé aux candidats à une formation de déposer leurs dossiers de mise en position de stage avant le 30 mai de chaque année, date butoir pour pourvoir le poste qu’il va libérer dans le cadre du mouvement national. Cette question de renforcement de capacités dans des structures autres que celles en charge de la formation des enseignants pose un certain nombre de problèmes : l’enseignant est tenu de demander une autorisation de participer à ces concours, ce qui n’est pas souvent le cas. Cela rend difficile la prise en compte du poste qu’il occupe dans les prévisions.
Le MEN n’a pas aussi à s’adapter au rythme des Instituts et autres Ecoles de formation dans le cadre de la gestion prévisionnelle des ressources humaines. Toutefois, tout enseignant devant bénéficier d’une mise en position de stage au-delà des dates prévues par le MEN peut reporter son inscription à l’année n+1. Pour les enseignants des disciplines en déficit, le ministère est confronté à d’énormes difficultés et tout le monde sait que l’absence de professeur est l’une des causes majeures de grève des élèves et de manifestation des populations. D’ailleurs pour pallier ce déficit, le MEN a recours à des solutions alternatives telles que l’utilisation de ressources numériques. Entre la volonté de l’individu et l’intérêt général, il y a un arbitrage à faire pour procéder par ordre de priorité dans les choix à opérer. Je laisse les Sénégalais apprécier.
Le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan, Amadou Ba, a préconisé une révision du régime indemnitaire des fonctionnaires. Les enseignants trouvent que c’est un programme d’ajustement pour appliquer les recommandations des Assises. Quel commentaire cela vous inspire ?
Aucun commentaire, de tels propos n’engagent que la personne qui les a tenus.
Peut-on dire aujourd’hui que l’affaire de la fraude dans le concours des élèves maîtres est derrière nous. Quelles sont les dispositions qui ont été prises pour que pareille situation ne se reproduise à l’avenir ?
Bien sûr, les 690 ont été remplacés et les candidats concernés devaient rejoindre leur centre de formation avant le 05 septembre sous peine d’être remplacés, ce qui du reste est déjà fait. Pour sécuriser davantage le concours, de nouveaux textes sont pris.