Publié le 28 Jun 2013 - 09:50
HOMOSEXUALITE ET PEINE DE MORT

Sall et Obama s’imposent une entente cordiale

 

Sur deux questions politiques sensibles, l’homosexualité et la peine de mort, les présidents sénégalais et américain ont préféré cultiver le respect mutuel au cours de leur conférence de presse commune d’hier. Mais à l’aune des dividendes politiques, Macky Sall, qui avait plus à perdre en cas de faute d’appréciation, a plutôt frappé un grand coup qui lui enlève une grosse épine du pied au plan national.

Pour brève qu’elle aura été, la visite du président des Etats-Unis d’Amérique au Sénégal aura permis à la diplomatie sénégalaise de marquer des points importants sur la scène internationale. Lorsque la première puissance politique, économique et militaire vous accepte dans son giron, les dividendes à en tirer ne sont pas moindres s’il existe des capacités et des compétences préparées à aller les dénicher là ils sont. C’est toute la problématique du prolongement qu’il sied de donner à cet événement en termes de capitalisation.

Mais le clou de cette visite du Président Barack Obama, notamment lors de la conférence de presse commune d’hier, c’est incontestablement la très belle répartie du Président Macky Sall sur la question de l’homosexualité au Sénégal. Pour la première fois, de manière sobre et publique, la première autorité du pays a donné le coup de massue définitif à un débat politicien qui a semblé servir de programme politique alternatif et périphérique à des responsables du Parti démocratique sénégalais, mais aussi à certains cercles de marabouts affairistes ayant brutalement perdu les privilèges d’appartenance à la bande des Wade.

En alliant fermeté, équilibre et courtoisie, Macky Sall a (très) parfaitement réglé son sort à ce faux débat là, en des mots simples, compréhensibles et acceptables par tous. Face à «l’homme le plus puissant de la terre», le chef de l’Etat sénégalais a positivement assumé sa divergence fondamentale sur un sujet de société clivant entre deux Etats. Ce qu’il a dit, c’est exactement ce qu’il y avait à dire hic et nunc : le Sénégal n’est pas les Etats-Unis, nos mentalités ne sont pas identiques aux leurs, nos valeurs sociales et culturelles ne sont pas forcément solubles dans celles en vigueur Outre-Atlantique, nous sommes dans un pays majoritairement croyant… Et quelles que soient les motivations de la journaliste américaine qui a soulevé ce débat indirect mais attendu entre les deux hommes d’Etat, le Président sénégalais a trouvé là l’occasion de ranger dans les poubelles de la petite histoire les divagations d’une poignée d’hommes abonnés aux petits détails qui servent de support aux pires politiciens de notre espace public.

Respect mutuel

La charge calculée et froide de Macky Sall à l’endroit des rentiers porteurs du «débat» sur l’homosexualité dans notre pays est d’autant plus retentissante qu’elle a été mise en corrélation avec les choix démocratiques et sociaux des Américains face à la peine de mort. Son habileté a été de rappeler, en des mots (encore) simples, que la peine capitale n’existe plus au Sénégal depuis son abolition par l’Assemblée nationale le 29 juillet 2004. Or, elle perdure encore dans l’Etat fédéral ainsi que dans 32 des 50 Etats fédérés américains, dans des formes qui soulèvent chaque jour l’ire et l’indignation des organisations de droits humains à travers le monde. Devant ces réalités, Barack Obama est-il en mesure d’être un donneur de leçons ? Le chef de l’Administration américaine sait heureusement être raisonnable en situation pareille, il l’a démontré en ne polémiquant pas inutilement. C’est tout à son honneur. A leur honneur ! Entre eux deux, les Samuel Huntington du choc permanent des civilisations sont restés dans les cordes, à leur vraie place. Cet épisode survenu hier au palais de la République est de ceux qui révèlent le respect mutuel que deux chefs d’Etat d’égale dignité et démocratiquement élus se portent.

En attendant la suite des événements sénégalo-sénégalais sur cette question qui ne divise pourtant nullement le pays, ceux qui voulaient en faire un cheval de bataille ont sans doute perdu un «allié» auprès de leurs marabouts attitrés. Il y a du temps pour en trouver un autre…

MOMAR DIENG

 

 

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