''Nous préférons les accréditations pour les rédactions, pas pour les journalistes''
En visite de courtoisie à la rédaction d'EnQuête le vendredi 04 mai, le conseiller spécial du président de la République a décliné des formats de collaboration que le pouvoir envisage de proposer à la presse.
Doit-on s'attendre à ce que des journalistes soient accrédités au Palais ?
Moi je suis contre les journalistes qui viennent tous les jours au palais et qui attendent. Si les rédactions le font, les journalistes seront payés à ne rien faire. Le mieux, je pense, c'est qu'il y ait des accréditations pour les rédactions, pas pour les journalistes. Il y a par exemple la rédaction d'Enquête qui est accréditée ; et en fonction de l'actualité et du domaine concerné, on peut envoyer quelqu'un. Cela permet de ne pas fonctionnariser les journalistes et de ne pas créer trop de proximité entre eux et des personnalités. Cela veut dire que cette accréditation-là, c'est le Rédacteur en chef ou le Directeur de la publication qui la gère, de la manière la plus rigoureuse. A la Présidence aussi, il y a des questions de sécurité, on ne peut pas laisser tout le monde y entrer. Nous avons un président qui fait ce qu'il dit, et d'ailleurs qui préfère faire et dire. Donc nous aussi, nous sommes obligés d'être dans cette dynamique.
Est-ce que cela ne va pas contribuer à verrouiller l'information, plus qu'à la divulguer ? N'est-ce pas un prétexte pour encadrer l'information afin que des choses ne sortent pas ?
Vous savez, notre rôle nous, c'est justement d'encadrer l'information, votre rôle vous, c'est de tout faire pour accéder à l'information. C'est ça. En matière de sociologie de l'information et de la communication, c'est le rapport de forces entre la source de l'information et le ''guetteur'', celui qui est en quête de l'information. Nous faciliterons l'accès des journalistes à toutes les informations qui revêtent un intérêt public évident. Si je vais vers vous, ce n'est pas pour vous informer, c'est pour communiquer. Cela veut dire que je sélectionne, dans une masse d'informations, ce que je veux vendre au public et je vous l'apporte. Par contre vous, vous venez vers moi chercher de l'information, sur la base de vos propres attentes et de vos propres besoins. C'est cela la relation classique entre les institutions et les journalistes. Mais ce que nous pouvons assurer de façon claire et précise, c'est que nous faciliterons l'accès à l'information.
Est-il prévu des conférences de presse du président de la République à intervalles réguliers ?
C'est parfaitement possible. Nous allons vers les rédactions et vers d'autres acteurs pour recueillir le maximum d'informations, d'avis, de suggestions ; identifier aussi les attentes des uns et des autres, parce que c'est cela qui va nous permettre de bâtir un plan de communication et une stratégie de communication. Ainsi, les différentes outils, espaces et formes de communication seront utilisés pour que les citoyens sénégalais accèdent à l'information relative aux activités du chef de l'État. C'est cela notre rôle. Et parmi ces espaces, outils et autres formes de communication, il y a une conférence de presse. Peut-être que nous aurons une conférence de presse annuelle précédée de petites déclarations. Nous allons chercher des responsables visuels et on va faire le maximum de décors mobiles, pour permettre au président de faire des fois des déclarations de deux à trois minutes sur des questions assez fortes. Sinon, nous allons aussi gérer des demandes d'entretien et d'interview. Si on compte les hebdomadaires, les quotidiens, les radios, les télés et les sites internet, nous nous retrouvons avec plus de 60 organes, et ce n'est pas très facile à maîtriser.
Un porte-parole du gouvernement, un porte-parole de la présidence, mais également vous pour la communication. N'y a-t-il pas pléthore à ce niveau ?
C'est très différent, le gouvernement a son porte-parole, comme tous les gouvernements. Là, c'est Serigne Mbaye Thiam qui va relayer les conclusions des Conseils interministériels, les décisions du Conseil des ministres. Il pourra annoncer les décisions fortes du gouvernement du Sénégal, être interviewé par les journalistes sur les orientations et actualités gouvernementales, etc. Tout cela est le rôle du porte-parole du gouvernement. Le porte-parole du président de la République est le porteur, comme on dit, de la parole du président de la République. C'est-à-dire que le président peut lui dire de relayer tel ou tel message, selon telle ou telle forme. Nous, notre rôle c'est de veiller à l'accès des citoyens à l'information relative aux activités ou aux initiatives du président de la République. C'est également de veiller à ce que les décisions, les initiatives du chef de l'État, soient bien comprises par rapport aux objectifs de communication que nous nous fixons. C'est aussi d'atténuer les différences de perception entre ce que nous, nous faisons ou projetons, et la manière dont les populations accueillent ce que nous faisons. C'est organiser la communication du président de la République de façon générale en veillant sur la cohérence et la clarté de ses discours, sur la régularité et l'organisation de ses apparitions publiques en matière de communication.
Autant Wade était exubérant, expansif dans le comportement, mais aussi dans la façon de faire, autant Macky Sall est renfermé, secret, froid. Cela ne complique-t-il pas votre tâche et celle des journalistes ?
Non du tout. Le président de la République est un homme très chaleureux, très ouvert. Bon maintenant, on ne change pas les gens ! Moi je pense, en tant que spécialiste en communication, que la personne, on doit la valoriser à partir de ce qu'elle est en réalité, non à partir de ce qu'on voudrait qu'elle soit. Je pense que les Sénégalais ont justement élu un homme bon, qui n'est pas intempestif, qui n'est pas trop expansif, qui ne s'émerveille pas trop facilement, qui est comme il est depuis qu'il est ce qu'il est.
Propos recueillis par la Rédaction