Publié le 27 Jan 2021 - 20:24
MORTALITÉ CORONAVIRUS EN AFRIQUE

Les chiffres effarants du Sénégal par rapport à ses voisins

 

Longtemps deuxième mondial, vanté sous tous les toits, le Sénégal fait partie des pays qui ont les pires chiffres dans l’espace UEMOA et CEDEAO.

 

‘’Deuxième’’ pendant un bon moment, le Sénégal serait-il en passe de devenir le dernier, en matière de gestion du coronavirus dans la sous-région ouest-africaine ? En tout cas, ses chiffres restent des plus macabres dans cette partie du continent. Avec 25 127 cas déclarés positifs à la Covid-19 pour 592 décès, le pays, si l’on se fie au bilan quotidien de ‘’Jeune Afrique’’, fait à peine mieux que le Nigeria avec ses 214 millions d’habitants.

En effet, le géant ouest-africain, selon les chiffres d’hier, a déclaré officiellement 122 996 cas pour 1 507 décès. En faisant le ratio, le Sénégal se retrouve avec un taux de létalité de 2,35 %, nettement moins bien que le Nigeria qui en est à un taux de létalité de 1,22 %.

Souvent comparée au pays de Léopold Sédar Senghor dans l’espace UEMOA, la Côte d’Ivoire est loin devant, selon ce classement basé sur les chiffres officiels. Pendant que Dakar crève la barre des 2 % de taux de létalité, Abidjan en est à un taux honorable de 0,53 %. Soit 27 096 cas pour 146 décès seulement. Pendant ce temps, le Burkina Faso a compté 10 103 cas pour 117 décès, soit un taux de létalité de 1,15 %. Le géant ghanéen, pour 62 135 cas positifs, se retrouve avec 372 décès, soit un taux de 0,59 %. Le Niger, pour 4 374 cas, s’en sort avec 151 décès, soit un taux de létalité de 3,45 %.

Chez nos voisins les plus immédiats, la maladie est loin de créer la psychose. Au Mali, sur 7 995 cas diagnostiqués, 324 ont perdu la vie, soit un taux de létalité de 4,05 %. Pour sa part, la Guinée a officiellement détecté 14 375 cas pour 81 morts seulement, soit un taux de létalité de 0,56 %. La Mauritanie, pour 16 421 cas positifs a signalé 417 morts. La Gambie, pour 4 008 cas, a recensé 128 décès. En termes de pourcentage, ces pays se retrouvent respectivement avec des taux de létalité de 2,53 %, 3,19 %.

Il ressort de ces chiffres officiels qu’en matière de nombre de décès, le Sénégal devance seulement le Nigeria dans l’espace CEDEAO. Mais si l’on se réfère au taux de létalité par pays, il se dispute les dernières places avec la Mauritanie (2,53 %), mais peut néanmoins se targuer d’avoir fait mieux que la Gambie (3,19 %), le Niger (3,45 %) et surtout le voisin malien qui est bon dernier, avec un taux de létalité de 4,05 %.

Un taux qu’il faut cependant relativiser, sous réserve de la détermination des échantillons sur la base desquels les pays effectuent leurs tests.

Les tests post-mortem : l’effet multiplicateur

L’une des raisons qui pourraient expliquer ce nombre élevé de morts officiellement recensés au Sénégal par rapport aux pays voisins, c’est sans doute les tests controversés sur les morts. Selon une source médicale, des instructions ont été données aux médecins de district et autres hospitaliers pour réaliser des tests sur les personnes décédées. Est-ce une volonté d’avoir les chiffres exacts de la mortalité du nouveau coronavirus ou tout simple d’effrayer les populations pour mieux réussir les stratégies de lutte contre la pandémie ? On ne le saura peut-être jamais.

Interpellé sur la question, le Dr Abdoulaye Bousso n’a pas réagi aux questions d’‘’EnQuête’’.

Une chose est sûre. Même dans les pays où le coronavirus fait des ravages et où les moyens sont nettement plus élevés, la façon de comptabiliser les décès Covid et de pratiquer les tests a toujours fait l’objet de vives controverses. En France, jusque-là, les chiffres publiés montrent les morts dans les hôpitaux et les Ehpad. Notre interlocuteur précise : ‘’Je doute que dans les pays de la sous-région, les autorités effectuent des tests mortem. Moi, je ne sais vraiment pas l’utilité de tels tests. De plus, la personne peut être un faux positif et mourir d’une autre pathologie. Dans ces cas, il n’y a qu’une autopsie pour déterminer correctement les causes du décès.’’ L’autre hypothèse est que la personne peut certes avoir la Covid, mais était asymptomatique. ‘’Au nom de quoi on doit imputer la mort d’une telle personne au coronavirus ? Elle peut bel et bien mourir d’une autre affection. Pour moi, ce n’est ni honnête ni scientifiquement acceptable de faire un test sur une personne décédée et d’imputer systématiquement la cause du décès à la Covid, en cas de positivité. Et c’est malheureusement ce que demande le Cous (Centre des opérations d’urgence sanitaire) aux districts et hôpitaux’’.

Il faut noter qu’ils sont nombreux les scientifiques à estimer que le véritable indicateur pour déterminer l’incidence de la pandémie sur la mortalité, c’est la surmortalité au terme de la pandémie. En France, Santé publique effectue une surveillance syndromique, à partir d’un nombre de décès attendus dans une population donnée, sur un temps donné, pour établir la vérité sur la mortalité du nouveau coronavirus. ‘’C’est le surplus par rapport à ces estimations qui donnera la vérité sur le nombre de décès pendant la période d’épidémie de Covid-19, dans quelques mois, une fois l’épidémie terminée’’, disait le Dr Olivier Obrecht à ‘’l’Est républicain’’.

Cela dit, selon les différents chiffres fournis par les pays et des instances régionales et internationales, la deuxième vague est dans tous les cas nettement plus mortelle que la première. Par le taux de létalité, estime ‘’JA’’, elle inquiète un peu partout dans le continent. ‘’Parmi les pays où la deuxième vague est particulièrement spectaculaire, on compte le Nigeria, l’Afrique du Sud, le Mali, la Mauritanie, le Burkina Faso, le Sénégal et la plupart des Etats du sud du continent : Zambie, Zimbabwe, Botswana, Malawi, Eswatini’’, lit-on sur le portail. En moyenne, le taux de létalité est estimé à 2,5 % en Afrique, contre 2,2 % dans le reste du monde, selon les calculs de l’Africa CDC (l’instance qui gère la réponse à la pandémie au nom de l’Union africaine).

MOR AMAR

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