"Aujourd’hui, notre profession se sent menacée"
L'Assemblée générale ordinaire de l'Ordre national des huissiers du Sénégal (ONHS) a eu lieu hier. Elle a permis à son président de rappeler que le nouveau statut dont sont dotés les huissiers, consacré par le décret n°2020-1589 du 6 août 2020, leur confère certes des avantages appréciables, mais les oblige aussi à élever leur niveau de performance pour offrir aux usagers et justiciables qui sollicitent leurs prestations un service de grande qualité. Ce statut, selon Me Adama Dia, peut assurément permettre à leur profession d’aller plus de l’avant.
"Il nous appartient de le mettre en œuvre. Nous sommes engagés dans cette dynamique avec les initiatives prises pour mettre en place le compte professionnel et la caisse commune de solidarité. Je suis profondément convaincu que nous atteindrons tous nos objectifs, avec le concours et le soutien de tous. J’exhorte chacun de vous à garder à l’esprit que, nous huissiers, nous devons donner une bonne image de nous-mêmes. C’est à ce prix que nous gagnerons le respect dans la société. Pour cela, nous devons avoir une discipline collective, qui ne peut être que la résultante de la discipline de chacun d’entre nous. J’invite donc chaque huissier à instaurer en lui la culture de la discipline", a indiqué Me Dia.
Selon lui, l’ordre des huissiers est devenu, à travers son article 9 du décret 2020-1589 du 6 août 2020, un établissement public à caractère professionnel doté de la personnalité juridique.
À ce titre, il peut, à travers ses différents organes de décision, poser des actes pouvant asseoir davantage son autorité. Il convient, selon lui, de rappeler que l’une des vocations les plus importantes d’un ordre professionnel est d’instaurer la discipline parmi ses membres. L’ordre doit protéger les intérêts moraux et matériels de la profession d’huissier de justice. Il doit agir afin que nul ne compromette ces intérêts.
"Et aujourd’hui notre profession se sent menacée particulièrement par une autre profession qui s’immisce dans ses attributions. Je serai plus juste en disant certains membres d’une profession, parce que ce n’est pas un fait généralisé. Je veux parler des agissements de certains commissaires-priseurs, précisément deux membres de cette profession qui se donnent la liberté de faire des actes d’exécution forcée, lesquels relèvent sans conteste du ministère de l’huissier de justice. C’est une affaire qui préoccupe la profession d’huissier de justice au plus haut point. Nous profitons de cette tribune pour dénoncer encore une fois ces agissements, après l’avoir fait par un écrit dans le passé. C’est un problème qui dure, qu’il urge de régler au regard de la récurrence des faits et nous pensons que l’autorité de tutelle des professions judiciaires dispose des moyens pour ce faire. C’est même une question de sécurité juridique, car les justiciables sont exposés. Nous voudrions rappeler que cette affaire, sur plainte de notre ordre, est remontée jusqu’à la Cour suprême qui s’est prononcée dans un arrêt, pour dire que les huissiers avaient un monopole en matière d’exécution forcée des décisions de justice. Il ne peut donc plus avoir matière à débat sur cette question", a rétorqué Me Adama Dia.
Par ailleurs, il a lancé un appel pressant au garde des Sceaux, Ministre de la Justice, pour revoir considérablement à la hausse le montant des crédits alloués au paiement des émoluments dus en matière de frais de justice criminelle, correctionnelle et de simple police.
Ismaïla Madior Fall entend payer les émoluments dus aux huissiers
Venu prendre part à cette activité, le ministre de la Justice, Garde des Sceaux a soutenu qu'un effort a été fait ces dernières années, avec le paiement d'arriérés pour un montant assez conséquent. Le ministère de la Justice entend poursuivre, selon le Pr. Ismaila Madior Fall, cette dynamique de paiement des émoluments dus aux huissiers, qui constituent une source de revenus très importante pour certains. Toutefois, ce paiement se fera en considération des ressources financières allouées au département. "Vous avez aussi demandé que le décret fixant le tarif des huissiers en matière correctionnelle soit revu. Votre requête est des plus légitimes. Un texte qui, vous l'avez relevé, date de plus de quarante ans, doit pouvoir connaître une révision.
Des instructions seront données à la direction compétente pour que vous travailliez ensemble sur la modification du décret. En ce qui concerne l'indemnité compensatrice pour cessation d'activité, vous reconnaîtrez que c'est une avancée majeure pour la profession d'huissier. Je rappelle, ainsi qu'en dispose le statut, que cette indemnité est fixée d'accord parties entre l'huissier présentateur ou ses ayants droit et l'huissier présenté pour la continuation de l'activité et, à défaut d'accord, par une commission. En tout état de cause, la convention de présentation doit être approuvée par le ministre de la Justice. Soyez rassuré que l'autorité saura veiller à ce que l'huissier qui cesse son activité ou la famille de celui-ci ne soit pas lésé dans ses droits. Je voudrais vous assurer que je serai attentif aux réflexions qui sortiront de vos travaux qui, je n'en doute point, seront fructueux", a promis le ministre.