Publié le 27 Feb 2024 - 14:50
ESSA FAAL, AVOCAT GAMBIEN ET ANCIEN RESPONSABLE DE LA COMMISSION VÉRITÉ ET RÉCONCILIATION GAMBIENNE

"Le dialogue peut jouer un rôle de compromis entre les acteurs politiques, mais il doit se référer à la Constitution pour éviter une crise institutionn"

 

Le dialogue proposé par le président de la République Macky Sall a débuté ce lundi 26 février, avec la participation d’une minorité d’acteurs politiques et de la société civile pour trouver un accord sur la date de la Présidentielle.  Pour l’avocat international gambien Essa Faal, qui a dirigé la Commission vérité, réconciliation et réparations, le Sénégal a des choses à apprendre de son pays pour éviter une impasse qui pourrait déboucher sur une stabilité sous-régionale.

 

Le dialogue tant chéri par les collaborateurs du président de la République n’a pas le vent en poupe. Seuls Amadou Ba, candidat du régime, et Boune Abdallah Dionne ont répondu à l'appel du chef d’État, sur les 19 candidats retenus par le Conseil constitutionnel. Face à cette situation, Essa Faal, connu pour son rôle phare dans la Commission vérité, réconciliation et réparations, pense que le Sénégal peut s’inspirer de la Gambie pour retrouver le chemin de la paix. ‘’Les situations sont entièrement différentes. La Gambie a vécu une longue période de violation des Droits de l’homme marquée par des détentions arbitraires, de disparitions, des tortures, violation de la liberté d’expression occasionnant parfois la persécution de beaucoup de journalistes. Ces choses ne se sont pas passées au Sénégal. Pour autant, il y a des problèmes politiques et sociaux au Sénégal. Le Sénégal et la Gambie ne font pas exception dans le monde. Dans la culture africaine, la plupart des crises sont résolues grâce au dialogue et aux discussions. Le dernier espoir du peuple, c’est l’État de droit et son application par le pouvoir Judiciaire. Si le Sénégal ne met pas la loi devant et au centre de tous les enjeux en cours, cela pourrait créer des problèmes sérieux pour l’avenir du pays, parce que les Sénégalais sont bien éduqués et bien conscients, particulièrement  les jeunes’’.

Il poursuit sur cette lancée en alertant les autorités locales : ‘’Si ces jeunes pensent que leur droit est de plus en plus violé et que le processus démocratique est devenu une sélection plutôt qu’une élection, ils peuvent se rebeller contre le régime et ce sera un danger qui pourrait même déstabiliser la sous-région.’’

L’absence de plusieurs personnalités soulève des doutes sur la représentativité et la légitimité de cette initiative présidentielle et même les bases légales agitées par certains proches du président et rejetées par un bon nombre d’opposants et de juristes sénégalais.

À ce niveau, l’ancien avocat de la défense à la Cour pénale internationale (CPI) tranche sans ambiguïté : ‘’Le dialogue ne peut pas être au-dessus de la Constitution. Le dialogue peut jouer un rôle de compromis entre les acteurs politiques, mais il doit se référer à la Constitution pour éviter une crise institutionnelle et tenir le scrutin dans un délai raisonnable. C’est une impasse politique qui peut être résolue, si on respecte les lois du pays. Le pays a un avantage particulier. Les chefs religieux, traditionnels et coutumiers peuvent jouer un grand rôle de régulateur social.’’  

Pour éviter le piège gambien, Essa Faal recommande toujours un respect strict des droits des populations. ‘’Les autorités doivent être conscientes que le pouvoir démocratique est entre les mains du peuple qui doit décider. Il a la souveraineté de choisir qui doit le gouverner et comment. Personne n’a le droit de s’imposer ou de proposer une autre personne différente de celle choisie par le peuple. Cette ressource doit être protégée’’.

Dans la foulée, Essa Faal est revenu sur le succès du modèle gambien qui s’est inspiré de l’Afrique du Sud, du Kenya, de la Sierra Leone et du Timor oriental : ‘’En 2016, quand Jammeh a perdu les élections, il y avait beaucoup de questions sans réponse concernant des gens disparus. Cette situation a poussé les autorités locales à savoir ce qui s’était réellement passé. C’est dans ce contexte que la Commission dialogue, réconciliation et vérité a été créée pour éclairer l’opinion nationale et internationale.’’

Même s’il reconnaît que toute œuvre humaine n’est pas parfaite, il s’enorgueillit du travail titanesque fait par cette commission. ‘’C’est l’une des meilleures commissions de dialogue et de réconciliation au monde. Les Gambiens, maintenant, savent ce qui s’est passé au cours des 22 ans de régime de Jammeh. Nous avons une histoire et des recommandations sont sorties de ce dialogue qui devrait être appliqué dans les plus brefs délais. Nous avons reçu de hautes distinctions’’.

Amadou Camara Gueye

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