Publié le 10 Sep 2021 - 01:03
MBOUR

Diass, Nguékhokh et Roff, les assoiffés

 

La disponibilité du liquide précieux, dans le département de Mbour, laisse entrevoir un déséquilibre total entre certaines localités par rapport à d’autres.  

 

Le problème de l’approvisionnement en eau est un réel casse-tête dans certaines localités du département de Mbour. Ce calvaire se présente en différentes facettes, selon les localités. Trois zones se présentent comme les plus touchées par cette problématique qui freine l’essor de ces communes. Entre manque total d’eau, tarissement de la nappe phréatique se répercutant sur les capacités des puits ou juste mauvaise gestion de l’approvisionnement en eau potable, Nguékhokh, Diass et le village de Roff - dans la commune de Malicounda - sortent carrément du lot.

Diass ou le paradoxe de l’eau

La commune de Diass, hôte de l’aéroport international Blaise Diagne, a toujours soif. Plusieurs quartiers ne sont pas dans le réseau d’eau et peinent à trouver le liquide précieux pour vivre correctement. Cette commune est confrontée à de réels problèmes de disponibilité de l’eau. Les habitants de certains quartiers de la commune vivent dans des situations très difficiles.

Situé sur un relief accidenté avec ses collines, Diass est mal loti en matière d’approvisionnement en eau. Dans les quartiers qui gravitent autour du CEM, par exemple, les femmes expliquent le calvaire dans lequel elles vivent pour pouvoir disposer du liquide vital. Fatou Seck, habitante du quartier Batadj : ‘’Nous les femmes sommes les plus touchées de ce manque d’eau, parce que c’est nous qui endossons toute la fatigue pour chercher de l’eau. On se réveillait à 3 h pour disposer de l’eau de nos robinets’’, explique la présidente des femmes du quartier. Ensuite, la situation a empiré, puisque, ‘’depuis deux ans, le peu d’eau qui coulait des robinets à ces heures tardives de la nuit a complètement disparu. Rien ne coule depuis. Ce sont maintenant des citernes qui nous viennent de certaines usines qui sont installées dans la commune, qui nous donnent de l’eau, au nom de Monsieur le Maire Cheikh Tidiane Diouf et de Djiby Ciss’’, ajoute Fatou Seck. Elle ajoute : ‘’Après avoir rempli le maximum de bidons, on les met sur des charrettes en payant entre 500 et 1 000 F pour les transporter chez nous, alors que ce n’est même pas loin. Ce qui constitue un lourd budget pour nous’’, déplore-t-elle.

El Hadj Moctar Barry de renchérir : ‘’Ça fait trois à quatre ans qu’on vit dans cette situation. On peut se réveiller même sans trouver de l’eau pour faire nos besoins. Des fois, on peut se réveiller sans avoir de quoi aller dans les toilettes. Et c’est une situation déplorable.’’

Selon les habitants de cette commune, les souffrances sont atténuées grâce aux efforts de certaines bonnes volontés de la commune qui volent à leur secours. C’est principalement le fils de l’ancien maire, Djiby Ciss, Président d’un mouvement dénommé Solution, qui serait en train de faire le tour des villages de la commune pour leur offrir des forages, afin de leur permettre un meilleur approvisionnement en eau. Il a doté le quartier de Batadj d’un forage d’une valeur de 10 millions, en guise de solution à la souffrance des populations. ‘’Ce forage, c'est pour tout le village, parce que celui qui était sur place alimentait Mbayar, Sankay et Ranfo. Et si on installe un autre forage, il pourra couvrir toute la commune de Diass. De ce fait, nous n'aurons plus de problèmes d'eau’’, souligne le président du mouvement Solution. Djiby Ciss révèle que son objectif est de faire en sorte que, d’ici à 2022, la commune de Diass n'aille plus prendre des bouteilles pour chercher de l'eau ailleurs.  

Dans la dynamique de solutionner définitivement ce problème de l’eau, l’édile de la commune a réussi à faire brancher Diass sur le réseau du KMS3 de la Sen’Eau qui traverse la commune. Un projet destiné à alimenter l’aéroport Blaise Diagne en eau.

Entre l’Asufor et la Sen’Eau, Nguékhokh ne sait pas à quel saint se vouer

A Nguékhokh, le problème est tout autre. En effet, dans cette commune, 80 % de la population n’ont pas accès à l’eau. Pourtant, un forage est installé dans la commune, depuis 1981, inauguré en son temps par le président Abdou Diouf. Il était géré par une structure associative qui devait se charger d’assurer un bon approvisionnement en eau aux populations.

Toutefois, les populations ne sont pas satisfaites de cette gestion de l’Asufor. Selon Aliou Sané, ‘’avant 2014, Nguékhokh n'avait pas de problème d'eau. C'est après que les gens ont commencé à sentir ce problème. La gestion de l'eau était assurée par l'association des usagers du forage (Asufor). C'était un financement de plus de cent millions venant de certaines coopératives. Tous les deux ans, cette association devait présenter un bilan de la gestion et procéder au renouvellement du bureau. De plus, ils devaient injecter les bénéfices dans le développement de la commune, puisque la population augmente de jour en jour et qu'on doit atteindre encore de nouveaux quartiers périphériques qui ne sont pas encore branchés au réseau. C'était également pour appuyer les postes de santé et les écoles avec la construction de salles de classe et autres. Mais on a constaté qu'il y a eu une gestion nébuleuse’’, dénonce le porte-parole du mouvement Thioytou Nguékhokh.

La commune connait un boom démographique et sa population grandit à une vitesse exponentielle. ‘’Au fur et à mesure que la commune connait une expansion, la gestion de l’eau devient de plus en plus mauvaise. Il n'y a pas de présentation de bilan, pas de renouvellement de bureau. Le réseau n'est pas élargi. Le matériel n'est pas renouvelé. A un moment donné, la population a quadruplé ; le réseau ne peut plus la satisfaire’’, explique Aliou Sané.

Cette situation plonge les populations dans une situation insoutenable. Cette vendeuse de jus locaux dans les écoles n’en peut plus. ‘’La population de Nguékhokh est actuellement dans un désespoir total’’, laisse-t-elle entendre avec dépit. Abissatou Diom explique : ‘’Les robinets sont alimentés par intermittence. Quand on a demandé la cause, on nous a expliqué que c'était dû au fait que les tuyaux sont vieux. Ensuite, on a dit que l'ancien château d'eau ne peut plus satisfaire la demande à Nguékhokh.’’ Elle renseigne que ‘’beaucoup de tuyaux ont éclaté un peu partout dans le village, quand la Sen’Eau a commencé. Ensuite, ils ont fermé les robinets. Mais cette semaine, l'eau recommence à couler. Il faut qu'on nous dise la vérité sur ce problème’’, fulmine Abissatou Diom.

Elle ajoute : ‘’Il faut quand même noter que depuis six mois, on n’a pas payé de factures d'eau dans Nguékhokh. Les gens de la Sen’Eau ont eu des problèmes avec ceux qui géraient l'eau auparavant. Depuis lors, on ne paye plus l'eau ici.’’

Au début du mois de juin, le directeur général de la Sen’Eau avait effectué une tournée dans les forages installés dans la commune, pour assurer l’eau à suffisance. Il avait annoncé que la commune du député-maire Papa Songo Diouf était désormais dans le périmètre urbain de la Sen’Eau et allait bientôt être approvisionnée correctement et à flot en eau.

Roff : des installations faites, mais aucune goutte d’eau depuis des mois

Dans la commune de Malicounda, on retrouve le village de Roff. Une bourgade nichée à 2 km de la route de Joal, à hauteur de Peulh Ga. Composé de plusieurs hameaux, ce village n’a jamais connu le plaisir d’ouvrir un robinet pour s’approvisionner en eau. André Bakhoum, habitant du village, explique : ‘’En réalité, nous souffrons énormément d'un problème d'adduction d'eau. Pour parler d’une bonne qualité, il faudra d’abord avoir de l'eau. Le problème en est qu'il n’y a pas d'eau. Même s'il y a des installations qui ont été déjà faites dans le village, il n’y a pas de branchements’’, informe-t-il.

Avant d’ajouter : ‘’On a créé les bornes fontaines, les tuyaux ont été installés, mais, jusqu'à présent, il n’y a pas d'eau aux robinets. Et s'il n’y a pas de l'eau qui coule des robinets, le problème reste entier.’’ Selon M. Bakhoum, Roff est un village qui existe depuis environ 200 ans. Toutefois, informe-t-il, un forage avait été construit dans le village. C'était pour le périmètre maraîcher, dans le but de lutter contre l'exode rural, dans les années 80, et permettre aux villageois de se sédentariser et d'exploiter ce périmètre, afin d’avoir quelques revenus. ‘’Dans les années 2000, la pluviométrie est devenue abondante. La nappe phréatique était en hausse. Au lieu que les gens continuent à exploiter le périmètre maraîcher, ils ont préféré aller creuser des puits dans leurs jardins ou leurs champs pour que, durant cette fin d'année, ils se retrouvent au moins avec 500 000 à 700 000, au lieu de 50 000 à 60 000 F avec le périmètre’’, révèle-t-il.

Du coup, le forage est tombé en panne et, depuis lors, personne ne l'a réparé. ‘’Ensuite, il y a de cela quatre à cinq ans, la pluviométrie a connu une baisse ; on est revenu au temps de marasme avec beaucoup de difficultés. Nous avons ici un puits de 45 m qui n’a pas d’eau’’, se désole-t-il. ‘’La population était assoiffée et la mairie, en partenariat avec des Coréens, a réparé le forage. Mais le problème reste entier’’. Dans ce village de la commune de Malicounda, pour s'approvisionner en eau, il faut se rendre au forage qui se trouve à plus d’un kilomètre, parce que Roff est composé de plusieurs hameaux.  

C’est pourquoi André Bakhoum interpelle le maire Maguette Sène : ‘’La commune de Malicounda compte 22 villages. A chaque fois qu'il y a un projet, nous sommes le dernier à être servi.’’

IDRISSA AMINATA NIANG

 

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