Le CNCR plaide pour l’application de la loi d’orientation agro-sylvo-pastorale
Le Conseil national de concertation et de coopération des ruraux (CNCR) a organisé, hier, dans la capitale du Nord, une grande journée de mobilisation pour se pencher sur les problèmes cruciaux du monde rural. Une rencontre que les pasteurs, agriculteurs et pêcheurs de la région de Saint-Louis ont également saisie pour porter un plaidoyer fort pour la promulgation des décrets d'application de la loi d’orientation agro-sylvo-pastorale (Loasp).
Venus de tous les départements de la région Nord, les membres des fédérations du Conseil national de concertation des ruraux (CNCR) ont échangé pendant plusieurs heures autour de thématiques concernant les sérieux problèmes du monde rural. En tant que plateforme paysanne autonome, le CNCR a fait de son combat l’amélioration des conditions et du cadre favorables à l’expression de tout le potentiel de développement des exploitations familiales qui assurent au moins 80 % des productions.
Pour Yaram Fall, vice-présidente du CNCR chargée de la pêche, avant de se réunir à Saint-Louis, l’organisation a fait une production de connaissances et d’études à travers le Sénégal pour identifier les problématiques qui minent le monde rural. “Au cours des discussions, on a relevé quatre thématiques qui ont beaucoup intéressé les acteurs par rapport à la loi d’orientation agro-sylvo-pastorale. Il s'agit de l'identité et du statut du paysan, de la reconnaissance des exploitations familiales, de la remobilisation des journées de concertation avec le gouvernement du Sénégal et de la réforme foncière”, a indiqué Yaram Fall.
Pour ce dernier point, les participants ont insisté pour qu'il y ait une véritable réforme foncière impliquée, adaptée et prenant en compte les préoccupations du monde rural. ”Il y a déjà des instruments mis en place par la société civile. Dans la vallée, malheureusement, on note beaucoup de manquements dans la gestion foncière. Il y a des accaparements de terres à grande échelle, mais aussi le non-accès des femmes au foncier agricole, entre autres problèmes. Pourtant, la Loasp, à travers son chapitre 6 et ses articles 22 et 23, reconnait l’urgence d’une politique foncière et de la réforme de la loi sur le domaine national. Car le milieu rural souffre du statu quo qui creuse les inégalités entre les territoires, les exploitations familiales et l’agrobusiness, entre hommes et femme”, a déclaré Mme Fall.
Selon des études de la FAO, trois Sénégalais sur cinq comptent sur l’agriculture pour vivre. Un secteur qui est majoritairement dominé par les exploitations familiales qui représentent 95 % des types d’exploitations agricoles et sont responsables de plus de 80 % des productions agricoles.
Toutefois, elles sont encore instables, irrégulières et relativement modestes, au regard des enjeux de sécurité alimentaire et nutritionnelle, d’emploi des jeunes, de balance commerciale.
80 % des productions sont des exploitations familiales
Avant de signaler que les niveaux relativement faibles des performances des exploitations familiales du Sénégal sont essentiellement liés à leur vulnérabilité aux chocs exogènes et à des conditions de travail peu favorables.
Pour la présidente du Collège des femmes du CNCR, l'économie du Sénégal repose essentiellement sur ce secteur agricole qui occupe plus de 60 % de la population active. Les activités agro-sylvo-pastorales et halieutiques ont un important effet d'entraînement sur les autres secteurs, dont la transformation agro-industrielle, le transport et le commerce, entre autres.
“On s'est mobilisé ici à Saint-Louis pour débattre et plaider les réelles préoccupations des acteurs du monde rural. On ne parle plus uniquement de relève générationnelle, mais d'insertion et d'installation des jeunes au sein des exploitations familiales, au sein des métiers de l'agriculture, au sein de la chaîne de valeur agricole”, a soutenu la vice-présidente du CNCR chargée de la pêche.
A la clôture des travaux, les différentes fédérations du CNCR de la région de Saint-Louis ont appelé à des changements significatifs en vue de créer les conditions favorables à l’amélioration des performances des exploitations familiales et de la prise en charge des autres défis. Pour y arriver, les membres de la plateforme plaident vivement pour la promulgation des décrets d'application de la loi d'orientation agro-sylvo- pastorale. “Le retard dans la formalisation du statut juridique des exploitations familiales prévue au chapitre 5 de la Loasp, en ses articles 16 à 21, est un frein à leur professionnalisation. Il limite considérablement leur accès au crédit et à des opportunités de financements ainsi que l’autonomisation des femmes et l’emploi des jeunes”, a-t-elle conclu.
IBRAHIMA BOCAR SENE (SAINT-LOUIS)