Publié le 17 Nov 2017 - 00:26
ZIMBABWE

L’armée et Grace Mugabe, deux camps qui se font face

 

Au Zimbabwe, l’intervention de l’armée a été provoquée initialement par le limogeage de l’ex vice-président Emmerson Mnangagwa, lundi 6 novembre 2017. L’homme politique déchu bénéficie en effet de liens forts avec l’armée, contrairement à Grace Mugabe, l’épouse du président Robert Mugabe.

 

Cela fait plusieurs années que le parti au pouvoir, la Zanu-Pf, est divisée entre deux factions. D’un côté, Grace Mubage, l’épouse du chef de l’Etat, se positionne pour succéder à son mari. De l’autre, Emmerson Mnangagwa, l’ex vice-président, représente la vieille garde du parti.

Celle qui il y a quelques années n’avait aucune fonction politique, Grace Mugabe donc, s’est depuis faite élire présidente de la Ligue des femmes de la Zanu-PF, multiplie les meetings politiques et fait savoir qu’elle est prête à succéder à son mari. Elle s’est également entourée de sa propre faction, qu’on appelle le G40.

Face à elle, Emmerson Mnangagwa est un allié historique de Robert Mugabe, aux côtés duquel il a lutté pour l’indépendance. Au fil des années, il a été ministre de l’Intérieur, de la Sécurité mais aussi de la Justice, autant de postes qui lui ont permis de tisser des liens proches avec l’armée. Il est en particulier proche du chef de l’armée, Constantine Chiwenga.

Un petit incident, d'importantes conséquences

Longtemps vu comme le dauphin du chef de l’Etat, Mnangagwa est au contraire devenu le rival à abattre, à partir du moment où Grace Mugabe a manifesté ses ambitions politiques. Il est dans le collimateur de la Première Dame depuis des mois, qui l’a accusé à plusieurs reprises de trahison, ou de vouloir renverser le chef de l’Etat.

Il semble d’ailleurs que la mise à l’écart de l’ex vice-président était prévue pour le prochain congrès de la Zanu-PF, en décembre. C’est finalement un simple incident, le 6 novembre, qui a précipité sa chute. Grace Mugabe a été huée par des partisans de Mnangagwa lors d’un meeting politique ; 48h plus tard, le compagnon de route de Robert Mugabe était déchu de son poste.

Ce n’est pas la première fois que Grace Mugabe obtient le limogeage d'un vice-président. Il y a trois ans, Joyce Mujuru avait déjà été victime de ses foudres.

Sauf que, cette fois, l'armée a décidé d'intervenir.

L'armée veut « arrêter cette purge »

John Stewart: «il y a une possibilité d’ouvrir cette transition, assistés par les militaires, (vers) un vrai projet national démocratique dont on avait besoin depuis très longtemps au Zimbabwe» Il faut dire que le renvoi d’Emmerson Mnangagwa, c'est un peu la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Non seulement parce qu’il est un proche du chef de l'armée, mais aussi parce que depuis son départ, une véritable purge est effectuée au sein de la Zanu-PF. Plusieurs de ses proches ont été écartés, dont une bonne partie sont des vétérans de la guerre d’indépendance.

Pour l’armée, c’est inacceptable. Le général Chiwenga n’a pas dit autre chose ce lundi en conférence de presse : pour lui, il faut « arrêter cette purge et ces manigances ». Le militaire avait ajouté que, « quand il s'agit de protéger notre révolution, l'armée n'hésitera pas ».

Pour l’armée, Grace Mugabe, qui se débarrasse d'un ex vice-président pour essayer de prendre sa place à ce poste et éventuellement succéder au chef de l'Etat est déjà, totalement inadmissible. Pour les militaires, non seulement l’épouse du président n’a aucune légitimité, mais en plus elle est née en Afrique du Sud, pas au Zimbabwe. D’ailleurs, au départ, elle était simplement la secrétaire de Robert Mugabe.

Alors, que va-t-il lui arriver à présent ? Il est trop tôt pour le dire. On ne sait de toute manière même pas où elle se trouve. Ce qui est certain, en revanche, c’est que plusieurs de ses proches, membres du G40, ont été arrêtés. C’est notamment le cas d’Ignatius Chombo, ministre des Finances, ou encore du leader des jeunes de la Zanu-Pf, Kudzai Chipanga. On est également sans nouvelles de Jonathan Moyo, le « cerveau » du G40.

Il faut également prendre en compte la division de l’armée. Pour l’instant le chef de l’armée, le général Chiwenga, contrôle la situation, mais cela pourrait encore changer. D’autant que la puissante Association des vétérans de la guerre de libération est également très divisée. Et puis, enfin, il y a l’Afrique du Sud. On peut se demander ce que vont faire Pretoria et la Communauté de développement d'Afrique australe, l’organisation régionale.

rfi

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